107ème Congrès Français d'Urologie, du 20 au 23 novembre 2013, au Palais des Congrès de Paris

Focus sur la prise en charge de la personne âgée en urologie et de l'homme âgé de plus de 50 ans.

Publié le 20 novembre 2013


Le congrès français d’Urologie, organisé par l’Association Française d’Urologie, se déroule du 20 au 23 novembre 2013, au Palais des Congrès de la Porte Maillot, à Paris.

Cet événement scientifique et médical comporte une dimension internationale :

  • Il accueille, chaque année, une société soeur étrangère : cette année, l’Association Algérienne des Urologues Privés (AAUP) et la Société Algérienne de Chirurgie Urologique (SACU) seront étroitement associées aux travaux des urologues français ;
  • Il accueille aussi le congrès des urologues canadiens, tous les 4 ans, témoignant du dynamisme des échanges au sein de l’urologie francophone.


Le congrès d’urologie est un rendez-vous incontournable de la formation continue, ouvert aux urologues, mais aussi aux secrétaires, aux infirmières et infirmiers, ou encore aux kinésithérapeutes pour favoriser les collaborations interprofessionnelles.

Des collaborations interprofessionnelles sont au coeur d’une table ronde animée par des journalistes, organisée mercredi 20 novembre, à 12h30, réunissant les professeurs Guy Vallancien (Paris) et Philippe Grise (Rouen) ainsi que Jean-Pierre Bastié (Toulouse) vice-président de l’AFIIU (Association Française des Infirmières et Infirmiers en Urologie).

Ce débat inaugurera une série de tables rondes organisées, pour la première fois cette année, chaque jour, au moment des pauses, afin de favoriser les échanges d’idées essentiels à l’évolution de la médecine et de l’organisation des soins, sur différentes thématiques :

  • Le rôle de l’urologue dans le suivi de la santé de l’homme : mercredi 20 novembre, 13h15
  • La mise en oeuvre des thérapies anti-cancéreuses : jeudi 21 novembre, 16h
  • La place du robot dans la chirurgie urologique : jeudi 21 novembre, 16h45
  • Le choix de la technique chirurgicale (résection classique, laser Holep® ou Greenlight®) dans le traitement de l’hypertrophie bénigne de la prostate : vendredi 22 novembre, 15h
  • La détection précoce du cancer de la prostate : vendredi 22 novembre, 15h45



Le programme du Congrès 2013 est téléchargeable sur le site de l'Association Française d'Urologie (AFU), en
http://www.urofrance.org/congres-et-formations/congres-francais-durologie/107-congres-afu.html



Les urologues de l’Association Française d’urologie ont souhaité par ailleurs mettre en avant plusieurs thématiques phares du congrès :

  • Le rapport du congrès sur le médicament en urologie, confiés aux professeurs Franck Bruyère (Tours), Cyrille Bastide (Marseille), Laurent Guy (Clermont-Ferrand) et Gilles Karsenty (Marseille).
    Un rapport qui ne se contente pas de reprendre les données des bases de l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé (ANSM) ou encore du Ministère de la Santé, mais qui passe au crible la littérature internationale sur les médicaments en urologie , fournit des informations sur la prescription et nourrit la réflexion des urologues sur l’évaluation des médicaments - avec une attention particulière à l’éducation thérapeutique et à la gestion des effets secondaires, en relation avec le patient.

  • La prise en charge de la personne âgée en urologie, à l’occasion du rapprochement de l’AFU et de la Société Française de Gériatrie et de Gérontologie.

  • Les recommandations AFU-HAS sur la chirurgie ambulatoire en urologie, dans le souci d’améliorer la qualité des soins, la sécurité du patient et d’optimiser les coûts.

  • La prise en charge de l’homme de plus de 50 ans, avec un zoom sur les pathologies (maladies cardiovasculaires, dépression, addictions, syndrome d’apnée du sommeil, etc.) nécessitant une évaluation et une prise en charge médicale hors domaine strict de l’urologie.

Les deux thématiques relatives aux personnes âgées sont présentées ci-après.


La prise en charge de la personnes âgée en urologie



Apprendre à mieux soigner les personnes âgées

C’est apprendre à mieux soigner l’ensemble des patients

Le 107ème congrès d’urologie est l’occasion de présenter les travaux du nouveau groupe transdisciplinaire qui réunit gériatres et urologues.

Les personnes âgées sont particulièrement exposées au développement de pathologies urologiques (incontinence urinaire, pathologies de la prostate, chez l’homme, cancers.
Ces pathologies urologiques peuvent retentir de manière importante sur leur qualité de vie et leur autonomie.
Mais le vieillissement ne s’exprime pas de la même façon chez tous les individus, et l’âge chronologique ne dit pas grand-chose de l’état de chacun : la prise en charge de la personne âgée doit donc toujours être personnalisée, et intégrer données médicales, mais aussi environnementales, familiales.
Et plus que pour tout autre patient, il faut veiller à ce que les soins dispensés – médicaments, interventions chirurgicales, gestes invasifs, comme la pose de sondes urinaires – ne mette pas en péril l’équilibre physique, psychologique, social de la personne, souvent fragile.

Afin d’améliorer tous les aspects de la prise de la personne âgée, les urologues de l’AFU se sont rapprochés de la Société Française de Gériatrie et de Gérontologie dans un intergroupe « gériatrie » qui présentera ses premiers travaux lors d’un forum d’exercice professionnel, organisé par le Pr Pierre Mongiat-Artus et le Dr Benoît Vignes, du 107ème congrès, le samedi 23 novembre à 9h35, salle 351.

Samedi 23 novembre, 9h35, salle 351
Qu’est-ce que les gériatres peuvent vous apporter
dans la gestion de vos patients âgés ?

Une session modérée par le Pr Pierre Mongiat-Artus (urologue, Paris),
le Pr Elena Paillaud (gériatre, Créteil),
et le Dr Xavier Rébillard (Urologue, Montpellier)

Avec notamment un point sur :
- L’évaluation gériatrique ( Dr Gilles Albrand – gériatre Lyon)
- Le syndrome confusionnel post-opératoire (Dr Guillaume Legrand – urologue Paris)



1. Pourquoi s’intéresser à la gériatrie ?

La population âgée augmente du fait de l’allongement de l’espérance de vie - on estime qu’entre 2000 et 2050, la population mondiale gagnera 10 ans de vie.
Et la part des individus de plus de 65 ans devrait représenter 25 % de la population totale en Europe, en 2025.

Le vieillissement de la population s’accompagne du développement de certains troubles ou pathologies de la sphère urologique – problèmes urinaires, incontinence ou rétention, cancers.


1.1. Le vieillissement de l’appareil urinaire

Le vieillissement des tissus et du système nerveux est un facteur d’entrée dans l’incontinence :

  • Lorsque l’on vieillit, les fibres musculaires lisses se raréfient au profit des fibres graisseuses, et des fibres de collagènes prolifèrent au niveau de la paroi vésicale, entraînant perte d’élasticité de la vessie et perte de contractilité.

  • La perte de tonus musculaire retentit aussi sur les sphincters lisse et strié ainsi que sur le périnéesur ce dernier point, les femmes sont plus touchées pour des raisons anatomiques et du fait des carences oestrogéniques liées à la ménopause.

  • Le muscle de la vessie se dénerve : le nombre des récepteurs sympathiques (qui contribuent au relâchement du muscle de la vessie) diminue d’où un déséquilibre favorable aux récepteurs parasympathiques (qui participent de contraction du muscle) – à l’origine d’envie pressantes.
    Par ailleurs, les récepteurs qui contrôlent le remplissage sont moins nombreux et ils fonctionnent moins bien.

  • Le vieillissement affecte aussi les rythmes physiologiques calés sur le jour et la nuit (rythmes nycthéméraux), notamment la sécrétion de l’hormone antidiurétique (vasopressine) qui ne joue plus bien son rôle d’espacement des mictions la nuit.


Plus l’âge avance, plus la continence est menacée, chez l’homme et la femme, même si celle-ci est souvent concernée pour des raisons morphologiques (poids de l’appareil génital sur les muscles périnéaux). On estime ainsi que les fuites d’urine ou l’incontinence concernent plus de 2,6 millions de personnes de plus de 65 ans, en France.
L’incontinence pèse sur l’autonomie de l’individu (crainte de sortir), comme la perte d’autonomie pèse sur la continence (difficulté à se déplacer, problèmes neurocognitifs, démences).
Ainsi 50 à 80 % des plus de 70 ans résidant en Etablissements Hospitaliers pour Personnes Agées Dépendantes (EHPAD) sont incontinents, contre 20 à 30 % de ceux qui demeurent à leur domicile.

Outre le problème d’incontinence, le vieillissement peut être à l’origine de rétentions urinaires dues

  • à un obstacle : notamment, chez les hommes présentant une hypertrophie bénigne de la prostate ;
  • à un défaut de contractilité de la vessie (dénervation, médicaments) ;
  • à une vessie instable (déséquilibre vésico-sphinctérien).


L’ensemble de ces troubles (incontinence et rétention urinaire) nécessite parfois le recours à la pose de sondes urinaires, facteurs d’infection, voire de dégradation de l’autonomie.
Le juste encadrement de la pose des sondes est donc un élément important de la prise en charge de la personne âgée, d’où le travail commun de l’AFU et de la SFGG sur ce sujet.


1.2. L’augmentation de la prévalence du cancer

Avec l’âge, le risque de développer un cancer augmente.

Les cancers de plus de 60 ans représentent 50 % de l’ensemble des cancers et 70 % de la mortalité.

A chaque étape de la prise en charge, il est nécessaire de peser la pertinence des soins :

  • Un traitement lourd, contraignant, présentant des effets indésirables est-il pertinent à l’âge du patient ?
  • Une hospitalisation ne risque-t-elle pas d’affecter l’état général
  • Comment organiser la prise en charge au domicile, facteur de maintien de l’équilibre de la personne ?


A ces questions, il n’existe aucune réponse toute faite car :

  • Les personnes âgées forment une population très hétérogène en termes de santé et d’espérance de vie.
  • L’environnement, l’entourage, social, familial, joue un rôle, et chaque situation est singulière.
  • Les souhaits du patient (être traité ou bien être soulagé, gagner en espérance de vie ou en qualité de vie) doivent être au centre de chaque décision.

Il est donc important de savoir engager le dialogue, avec le patient, son entourage, pour prendre la bonne décision et engager la démarche de soins dans un programme d’accompagnement plus global.
Et l’attention requise pour traiter au mieux le patient âgé, les réflexes acquis par l’équipe soignante rejaillissent sur la qualité des soins prodigués à l’ensemble de la population, tous âges confondus, comme le souligne le professeur Pierre Mongiat-Artus, responsable du nouveau groupe Gériatrie de l’AFU.


2. « Mieux soigner les personnes âgées pour mieux soigner l’ensemble des patients », l’éclairage du professeur Pierre Mongiat-Artus.


Quels sont les objectifs concrets de la commission Gériatrie à l’AFU ?

Pr Pierre Mongiat-Artus :
Le groupe a pour but d’améliorer la prise en charge de la personne âgée, en renforçant les échanges entre les gériatres et les urologues.
Les urologues ont une expertise technique de l’appareil urinaire et des troubles ou pathologies qui l’affectent avec l’âge.
En revanche, ils ont à apprendre des gériatres sur les spécificités de la prise en charge de la personne âgée, notamment en ce qui concerne l’évaluation de l’état général et de l’autonomie du patient grâce à des questionnaires adaptés, et la prise en compte de son environnement social, familial, dans le choix des solutions thérapeutiques mises en oeuvre.

Il est important de construire ensemble les solutions thérapeutiques les meilleures, à partir du croisement de nos expériences et de nos expertises.
Concrètement, le groupe se réunit deux fois par an pour avancer sur les projets communs retenus.

Aujourd’hui 5 projets ont été initiés ; ils portent sur :

  • L’évaluation du risque confusionnel post-opératoire - pour aider les urologues dans le cadre de la prise en charge chirurgicale).

  • L’évaluation du risque de perte d’autonomie post-thérapeutique :
    Les fonctions cognitives de la personne âgée risquent de décliner après une hospitalisation.
    Il faut pouvoir évaluer au mieux ce risque pour le prévenir ou le limiter: par exemple, en réduisant l’hospitalisation, en choisissant, quand cela est possible, d’avoir recours à la chirurgie ambulatoire.

  • L’évaluation du risque de rétention urinaire :
    L’expertise des urologues doit permettre aux gériatres de mieux estimer le risque de chaque patient, afin d’en tenir compte dans la prise en charge et les prescriptions.

  • Le drainage vésical à demeure :
    Quels sont les risques liés à la pose d’une sonde urinaire ?
    Quelle est la pertinence de son maintien ?
    Comment choisir la solution la plus pertinente pour améliorer l’état et la qualité de vie du patient ?

  • Le médicament chez la personne âgée :
    Comment choisir le bon médicament, compte tenu de la polymédication et des modifications d’absorption et d’excrétion liées au vieillissement ?
    Un sujet d’autant plus important que l’on manque de données pharmacologiques sur la personne âgée, exclue des essais qui incluent les sujets sans comorbidités.



Et, au-delà de ces aspects très techniques, l’objectif de la commission est de valoriser les aspects humains de la relation thérapeutique : le médecin doit apprendre à être attentif aux besoins et aux attentes du patient.

  • « Qu’est-ce que je pourrais faire pour vous aider ? » : il faut le questionner, recueillir son avis, directement ou auprès des aidants naturels.

  • Il faut aussi se questionner :
    Qu’est-ce guérir ?
    Est-ce supprimer la maladie et pour vivre plus longtemps ou bien soulager les symptômes pour permettre de vivre mieux ?
    La réponse n’est pas évidente et peut varier d’un patient à l’autre.



Un exemple concret ?

Pr Pierre Mongiat-Artus :
Si une patiente âgée peut guérir au prix d’une intervention chirurgicale qui nécessite qu’on la retire de son pavillon pour la placer en institution dans les suites.
Quel est le bénéfice du soin ?
Il faut y réfléchir avec humilité : apprendre à penser à ce malade et à sa place dans la société plutôt qu’à sa maladie ; apprendre, ensemble, à adapter le parcours de soin - par exemple, en allant vers le malade, plutôt qu’en le contraignant à aller vers le médecin, avec les conséquences de ce qui peut être vécu comme un déracinement ; en associant le médecin traitant à l’organisation de soins qui privilégient le maintien à domicile.



Est-ce que cela signifie qu’il faut moins traiter les personnes âgées ?

Pr Pierre Mongiat-Artus :
Non, car moins traiter, ce peut être maltraiter.
Ainsi, l’analyse des données montrent un sous-traitement des personnes âgées souffrant d’un cancer (1). Ainsi, les chiffres montrent que les hommes sont traités pour leur cancer de la prostate, essentiellement en fonction de leur âge chronologique.
Et les hommes âgés, en bonne condition, présentant un cancer de la
prostate reçoivent moins de traitements curatifs que certains hommes, plus jeunes, qui présentent beaucoup de comorbidités.
Il est vrai qu’il faut veiller à ne pas surtraiter le cancer de la prostate, qui évolue lentement : mais il faut pouvoir évaluer, de manière juste, l’état général et l’espérance de vie du patient.
Sous-traiter a finalement un coût humain voire économique – car au stade avancé, la prise en charge du cancer est aussi très coûteuse.


(1) Brossard 2007 BEH/InVS

L’essentiel est de s’interroger sur la pertinence des soins mis en oeuvre, en fonction de la situation du patient, de ses souhaits, lorsqu’il est en mesure de les exprimer, de son âge, de son insertion sociale.
Il n’y a pas de recette a priori: il faut faire de la médecine individualisée, de la bonne médecine.
Apprendre à mieux soigner les personnes âgées, c’est finalement apprendre à mieux soigner l’ensemble des patients.



La commission gériatrie envisage-t-elle de publier des recommandations de bonne pratique ?

Pr Pierre Mongiat-Artus :
La commission vient de voir le jour : dans un premier temps, nous allons d’abord produire des avis d’experts afin de mettre à disposition nos travaux.
Ils seront suivis, dans un second temps de recommandations de bonne pratique formalisées.



3. De la pertinence de la pose ou du maintien à demeure de sondes urinaires

Les sondes urinaires sont utilisées

  • En cas de rétention urinaire, lorsque le patient ne parvient plus à bien vessie ou à uriner seul – c’est le cas, notamment, les hommes souffrant d’hypertrophie bénigne de la prostate ;
  • Chez la personne âgée incontinente, lorsque les changes sont difficiles.

Cependant les sondes urinaires

  • Sont une source d’inconfort pour le patient ;
  • Entravent la liberté de mouvement et contribuent à accroître la dépendance ;
  • Ont une incidence psychologique ;
  • Augmentent le risque d’infections urinaires.


Elles doivent donc être utilisées en pesant le bénéfice pour chaque patient.

Sont-elles la seule solution ? Existe-t-il des solutions alternatives ?

  • Pour uriner convenablement – un bon tuyau ne suffit pas, il faut aussi un bon moteur pour uriner !
  • Etuis péniens pour l’incontinence de l’homme ?
  • Sondages intermittents : ils consistent à passer une sonde plusieurs fois par jour pour évacuer les urines, et permettent d’éviter la sonde à demeure, au bénéfice du patient qui gagne en autonomie et se trouve moins exposé au risque d’infection.


Quand et comment retirer la sonde ?

Dans quels cas est-il pertinent de maintenir une sonde à demeure ?

  • Lorsque le patient présente une rétention urinaire qui ne cède ni à la rééducation, ni aux traitements (médicaux ou chirurgicaux) ;
  • Lorsqu’il n’est pas possible d’avoir recours à des solutions alternatives ;
  • Lorsque l’incontinence urinaire aggrave des plaies ou des escarres ;
  • Lorsque la mobilisation du patient – même pour des changes – est pénible et douloureuse pour le patient.


Dans chaque situation, il importe de se soucier du patient :
Quelle est la meilleure solution pour lui ? Pour son confort, physique, moral ?
Les soins devant être adapté à ses besoins
.

Enfin il est important de prévenir, en amont, les situations qui peuvent conduire à la pose d’une sonde : par exemple, le traitement d’une hypertrophie bénigne de la prostate afin d’éviter son évolution vers une rétention urinaire.

Le travail du groupe Gériatrie est, avant tout, un stimulateur de bonnes pratiques : s’il apporte, grâce au travail de ses experts, des réponses aux médecins urologues et gériatres, il apprend aussi à se poser les bonnes questions sur la pertinence de chaque soin.









La prise en charge de l'homme de plus de 50 ans



Santé de l’homme

Rôle de l’urologue dans la prise en charge globale de l’homme de plus de 50 ans.


Spécialiste de l’appareil urinaire de l’homme, de la femme et de l’enfant, l’urologue est aussi le médecin qui prend en charge l’appareil génital de l’homme.

A partir, de 50 ans, les hommes qui consultent peu, en règle générale, leur médecin, en l’absence de circonstance pathologique particulière, peuvent être amenés, devant l’apparition de troubles urinaires ou sexuels ou bien pour une évaluation du risque prostatique, à aller voir un urologue, sur les conseils de leur médecin traitant.
Parmi les hommes consultant en urologie, certains se présentent avec des antécédents (pathologies diagnostiquées dans le passé ou terrain familial), des symptômes ou des signes physiques évocateurs d’états pathologiques ou de facteurs de risque nécessitant une évaluation et une prise en charge médicale qui sort parfois du domaine strict de l’urologie.

L’urologue se trouve de fait en situation de discuter avec le patient de ses habitudes de vie, et de proposer des modifications afin de prévenir l’aggravation ou l’apparition de certains symptômes, voire de l’orienter vers un autre spécialiste (cardiologue, addictologue, voire psychiatre).

  • Quels sont ces symptômes et pathologies ?
  • Quelles évaluations réaliser ?

    Le forum sur la santé de l’homme, organisé par le comité Andrologie de l’AFU, recense les informations clé pour définir les modalités de la prise en charge de l’homme de plus de 50 ans.



Samedi 23 novembre, salle 352 AB
Forum du Comité d'andrologie et de médecine sexuelle,
organisé par le Pr Stéphane Droupy (Nîmes), responsable du comité.


  • Troubles du sommeil : dysfonction sexuelle et troubles mictionnels, Dr Kamel BEN NAOUM (Nîmes).

  • Déficit en testostérone lié à l’âge, mythes et réalités.
    Le risque osseux, le cancer de la prostate, l’HBP et les troubles sexuels, Dr François MARCELLI (Lille).

  • Fertilité de l’homme après 45 ans, Charlotte METHORST (Suresnes).

  • Le coeur des hommes : dépistage, évaluation et prévention du risque cardiovasculaire, implications pour l’urologue, Dr Ludovic FERRETTI (Bordeaux).

  • Santé mentale de l’homme : dépression masquée, stress au travail, addictions (alcool, tabac), qualité de vie sexuelle après 50 ans, Dr Olivier MONTAIGNE (Lille).




1. Levers nocturnes et problèmes d’érection (dysfonction érectile) : dépister un éventuel syndrome d’apnée du sommeil

Devant un homme de plus de 50 ans qui consulte…
… parce qu’il est gêné par des levers nocturnes pour uriner,
… pour une dysfonction érectile ou une diminution du désir sexuel, obèse, ronfleur, ayant des accès de somnolence diurne,
il convient de dépister un éventuel syndrome d’apnée du sommeil.

Les vérifications à réaliser lors de l’interrogatoire du patient

Pour les mictions nocturnes

  • S’agit-il de mictions plus fréquentes, en règle générale (pollakiurie) ?
  • S’agit-il d’un déplacement des mictions en faveur de la nuit (polyurie nocturne) ?
  • S’agit-il d’insomnies à la faveur desquelles le patient urine ?



Pourquoi dépister ces troubles du sommeil ?

Le Syndrome d’Apnée du Sommeil (SAS), concerne 4 à 20 % des hommes selon les définitions.
On estime qu’environ 400 000 patients en France, sont atteints d’un SAS significatif.

Il est associé à un risque accru d’affections cardiovasculaires (risque d’hypertension artérielle (HTA) multiplié par 2, risque d’insuffisance coronarienne multiplié par 3, risque d’accident vasculaire cérébral multiplié par 4).

Il est parfois associé à un syndrome métabolique (obésité abdominale, diabète ou intolérance ou glucose, HTA, dyslipidémie).

En cas de SAS, le patient peut se plaindre

  • de ronflements, d’insomnies ;
  • d’arrêts respiratoires, avec somnolence excessive dans la journée ;
  • de maux de tête, nausées et vomissements ;
  • d’une dysfonction érectile (DE), la prévalence de la DE chez les patients avec un syndrome d’apnée obstructive étant de l’ordre de 50%.



Comment le SAS agit-il sur l’érection ?

La privation d’oxygène (hypoxémie) et le dysfonctionnement de l’endothélium vasculaire peuvent être responsables de la dysfonction érectile.

Par ailleurs, les variations de testostérone nocturnes sont liées au sommeil, avec des niveaux qui s’élèvent pendant le sommeil et chutent au réveil.
Les pics de testostérone coïncident avec un mouvement rapide des yeux (REM) du sommeil paradoxal.
La réduction du sommeil, et
particulièrement du sommeil paradoxal, est responsable d’une réduction des niveaux d'androgènes chez les hommes en bonne santé (1).

(1) Andersen and Tufik Sleep Med Rev. 2008 Oct;12(5):365-79


Comment diagnostiquer le SAS ?

  • Grâce à des questionnaires permet de dépister les hommes à risque (questionnaire de Berlin).

  • Grâce à un enregistrement polysomnographique nocturne. La polysomnographie mesure :
    - le nombre de d’apnées et d’hypopnées /heure ;
    - la saturation du sang en oxygène ;
    - éventuellement la mesure (pléthysmographie) des érections nocturnes ;

  • En complément, il est conseillé de demander une consultation chez le cardiologue, pour avis.



Les effets du traitement du SAS sur la sexualité

L’utilisation de la ventilation en pression positive continue permet d’améliorer significativement l’ensemble des domaines de la sexualité mesurés, et notamment la fonction érectile chez des patients ayant plus de 5 épisodes d’apnée/hypopnée /heure (2).

La chirurgie du voile du palais permet également d’améliorer la sexualité des hommes souffrant d’un SAS (3).


CONCLUSION

Il est donc recommandé de réaliser une recherche de SAS chez les patients consultant pour une diminution de la libido ou une dysfonction érectile en cas de surpoids, de ronflement, de fatigue diurne, ou en cas de résistance aux médicaments de la dysfonction érectile (IPDE5).

Le SAS est également associé à une altération de la réponse sexuelle chez les femmes (4).


(2) Budweiser et al. J Sex Med 2013
(3) Shin et al J Sex Med 2013
(4) Jankowski et al.J Urol 2008



2. Déficit en testostérone lié à l’âge, mythes et réalités :
Le risque osseux, le cancer de la prostate, l’HBP et les troubles sexuels.


Devant un homme de plus de 50 ans, qui consulte pour une diminution du désir sexuel accompagnée d’une perte des érections nocturnes et d’une dysfonction érectile apparue progressivement, l’éventualité d’un déficit en testostérone peut être explorée.

D’autant plus…
…s’il se sent rapidement fatigué, notamment lorsqu’il fait des efforts physiques,
… s’il est irritable,
… s’il a pris du ventre,
… s’il dort moins bien qu’avant.


Pourquoi dépister le déficit en testostérone ?

La testostérone est nécessaire tout au long de la vie de l’homme.
Le déficit en testostérone survient chez 6% des hommes, mais la prévalence augmente avec l’âge pour atteindre 15 à 30% des hommes de plus de 70 ans.

Le déficit en testostérone expose à un risque :

  • de modifications corporelles (perte de la masse musculaire, augmentation de la graisse viscérale, gynécomastie, altération de la qualité des phanères) ;
  • de déminéralisation osseuse : or, les taux de prévalence de l’ostéogénie, de l'ostéoporose et des fractures sont plus élevés chez les hommes ayant un déficit en testostérone. Le risque de décès chez un homme après une fracture ostéoporotique est 3 fois supérieur au risque de décès chez une femme ;
  • de dysfonctions sexuelles (5) ;
  • de troubles neuropsychiques ;
  • probablement à risque accru de maladies cardiovasculaires.



(5) Investigation, treatment and monitoring of late-onset hypogonadism in males: ISA, ISSAM, EAU, EAA and ASA recommendations Wang C, Nieschlag E, Swerdloff R, Behre HM, Hellstrom WJ, Gooren LJ, Kaufman JM, Legros JJ, Lunenfeld B, Morales A, Morley JE, Schulman C, Thompson IM, Weidner W, Wu FC, Eur J Endocrinol 2008; 159:507-14.
Eur Urol 2009 ; 55 : 121-30.
Int J Impot Res 2009 ; 21 : 1-8. /
J Androl 2009 ; 30 : 1-9.
Int J Androl 2009 ; 32 : 1-10. / Aging Male 2009 ;12 : 5-12

Les mécanismes conduisant au déficit en testostérone

Avec l’avancée en âge…
… la capacité du testicule à produire des hormones se réduit – avec la perte du rythme circadien, la diminution des cellules de Leydig.
… le fonctionnement de l’hypothalamus est altéré, la concentration cellulaire des récepteurs des androgènes diminue, d’où un moins bon rétrocontrôle des niveaux d’hormones.


Quand et comment diagnostiquer un déficit en testostérone ?

Devant…

  • l’association de symptômes spécifiques - au moins 1 - et non spécifiques - au moins 2.
    (lire la liste ci-après : Les signes et symptômes spécifiques à rechercher évoquant évocateurs de déficit en testostérone ) ;

  • L’existence d’une diminution de la testostéronémie totale au-dessous de 8 nmol/L (2,3 ng/ml) et /ou d’un niveau de testostérone libre calculée inférieure à 225 pmol/L (65 pg/mL) doit faire envisager la supplémentation en testostérone.


Le dosage de la testostérone biodisponible peut être utilisé à la place de la testostérone libre : son taux dépend de la méthode de dosage (se référer aux valeurs normales du laboratoire).
Lorsque le taux testostérone totale vérifiée est situé entre 12 et 8 nmol/L (3,5 et 2,3 ng/ml), un traitement d’épreuve de 3 à 6 mois peut être proposé afin de juger de son efficacité sur les symptômes.

Un auto-questionnaire peut être utilisé pour préciser la sévérité des symptômes : Aging male symptômes (l’AMS est disponible sur l’application « Imale », appli gratuite sur AppleStore).

Les signes et symptômes spécifiques à rechercher évoquant évocateurs de déficit en testostérone :

  • Développement sexuel incomplet ou différé, aspect eunuque ;
  • Diminution de la libido et de l’activité sexuelle ;
  • Diminution des érections spontanées, dysfonction érectile ;
  • Inconfort mammaire, gynécomastie ;
  • Perte de la pilosité cutanée (axillaire ou pubienne), diminution de la fréquence de rasage ;
  • Atrophie testiculaire (volume < 5 ml) ;
  • Infertilité masculine, azoospermie ;
  • Perte de taille corporelle, fractures pathologiques, diminution de la densité osseuse ;
  • Bouffées de chaleur.


Les signes et symptômes moins spécifiques :

  • Diminution de l’énergie, de la, motivation, de l’initiative, et de la confiance en soi ;
  • Sentiments de tristesse, humeur dépressive ;
  • Baisse de concentration et de la mémoire ;
  • Troubles du sommeil, tendances à l’endormissement
  • Anémie légère (normochrome normocytaire, dans l’intervalle féminin de normalité)
  • Force et tonicité musculaire diminuée ;
  • Augmentation de la masse grasse, de l’index de masse corporelle ;
  • Diminution des performances physiques et de travail.


Situations cliniques (pathologies ou traitements en cours) dans lesquelles la prévalence des déficits en testostérone est élevée :

  • Pathologie hypophysaire ou traitement, notamment radiothérapique, réalisé près de l’hypophyse (région de la selle turcique) ;
  • Traitements médicamenteux pouvant affecter la reproduction ou le métabolisme de la testostérone, par exemple, glucocorticoïdes ou opiacés ;
  • Perte de poids dans le contexte d’une infection à VIH ;
  • Insuffisance rénale terminale et hémodialyse ;
  • Bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) modérée à sévère ;
  • Infertilité ;
  • Ostéoporose ;
  • Fracture consécutive à un faible traumatisme ;
  • Diabète de type 2.


Situations associées à des altérations du niveau de SHBG (la globuline se liant aux hormones sexuelles) :

Situations associées à une diminution du niveau de SHBG

  • Obésité modérée ;
  • Syndrome néphrotique ;
  • Hypothyroïdie ;
  • Utilisation de glucocorticoïdes, de progestérone, ou d’androgènes stéroïdiens ;
  • Acromégalie (6) ;
  • Diabète.


(6) http://www.orpha.net/consor/cgi-bin/OC_Exp.php?Expert=963&lng=FR

Situations associées à une augmentation du niveau de SHBG

  • Vieillissement* ;
  • Cirrhose et hépatite* ;
  • Hyperthyroïdie ;
  • Utilisation d’anticonvulsivants* ;
  • Utilisation d’estrogènes* ;
  • Infection par le VIH.


* Situations très fréquemment associées à des altérations du niveau de SHBG.

L’administration de testostérone à des hommes ayant un déficit en testostérone

  • Améliore la composition corporelle (diminution de la masse grasse, augmentation de la masse maigre) ? Corrige l’anémie ;

  • Normalise le bilan lipidique ;

  • Améliore l’humeur ;

  • Restaure le désir sexuel en quelques semaines ;

  • L’amélioration de la qualité des érections est inconstante et un traitement (iPDE5) peut éventuellement être associé ;

  • Le traitement substitutif en testostérone augmente la densité osseuse chez les hommes ayant un hypogonadisme. Les données concernant le risque de fracture et les avantages à long terme de la substitution en testostérone ne sont pas encore disponibles. Une évaluation de la densité osseuse (rachis lombaire, col fémoral et hanche) devrait être proposée avant de débuter le traitement, puis à intervalles de 2 ans (surtout en cas d’ostéoporose ou d’antécédent de fracture pathologique).



Le traitement par testostérone augmente-t-il le risque d’hypertrophie bénigne ou de cancer de la prostate ?

À l'heure actuelle, il n'y a aucune preuve que le traitement par testostérone augmente le risque de cancer de la prostate ou d'hyperplasie bénigne de la prostate ou favorise l’expression clinique de cancers de la prostate infracliniques.

Dans l’attente de données précises, les hommes de plus de 45 ans présentant un déficit en testostérone doivent être informés des risques et des avantages de la substitution en testostérone avant de débuter le traitement et bénéficier d’une surveillance rapprochée de la prostate au cours du traitement.

Avant de débuter le traitement par testostérone, le risque de cancer de la prostate doit être évalué en utilisant, au minimum, le toucher rectal et le dosage du PSA.
L'évaluation peut intégrer d'autres paramètres comme l'âge, l'histoire familiale et l'origine ethnique.
Si le médecin considère que le risque est suffisamment élevé pour justifier un complément d’exploration, il peut le faire sur une base individuelle, mais la réalisation systématique d’échographie de la prostate ou de biopsies prétraitement n’est pas recommandée en routine.

Après le début du traitement par testostérone, les patients devraient avoir une surveillance prostatique à 3, 6, et 12 mois, puis, au moins, une fois par an.
Pour que des biopsies de la prostate soient indiquées, le risque de cancer de la prostate doit être suffisamment élevé (prostate suspecte au toucher rectal, augmentation significative du PSA, principalement).
Une augmentation importante ou un niveau élevé de symptômes mictionnels [par exemple, score IPSS7> 21 (7)] représente une contre-indication relative, bien qu'il n'y ait pas de données convaincantes suggérant que le traitement par testostérone exacerbe des troubles mictionnels ou favorise la rétention urinaire aiguë.
Le succès du traitement de l'obstruction des voies urinaires inférieures lève cette contre-indication relative.

(7) http://www.urofrance.org/fileadmin/medias/scores/score-IPSS.pdf

Les hommes ayant eu un traitement curatif pour un cancer localisé de la prostate et ayant un déficit en testostérone symptomatique sont des candidats potentiels pour un traitement substitutif par la testostérone après un intervalle prudent en cas de rémission complète clinique et biologique.

En l’absence de données sur les résultats à long terme du traitement substitutif en testostérone dans ce contexte, les cliniciens doivent avoir une connaissance suffisante du cancer de la prostate et des avantages et risques du traitement par testostérone dans cette situation.
Les avantages et risques du traitement par testostérone doivent être clairement discutés avec le patient, et compris et acceptés par celui-ci.
La réalisation d’un traitement par testostérone dans ce contexte est conditionnée par la possibilité de pouvoir réaliser une surveillance rapprochée
(8).

(8) Lejeune et al Progrès Urol 2013


CONCLUSION

Il n’est pas aujourd’hui recommandé de dépister le syndrome de déficit ne testostérone lié à l’âge chez un homme de plus de 50 ans asymptomatique.

Le dosage de la testostérone totale à la recherche d’un syndrome de déficit en testostérone doit être réalisé chez un homme consultant pour les symptômes décrit ci-dessus [Quand et comment diagnostiquer un déficit en testotérone ?].

Chez un homme avec une ostéoporose, il faut doser la testostérone totale matinale (8 h).
Si la valeur est basse, il faut répéter le dosage une, voire deux fois.
Si les deux (ou trois) valeurs sont < 8 (voire < 6,9 nmol/l), un traitement de testostérone est discuté en l’absence de maladie réversible ou de contre-indication, en visant des taux de testostérone dans la moitié inférieure de l’intervalle de référence.

Dans tous les cas de fractures typiquement ostéoporotiques chez l’homme, un traitement spécifique de calcium, vitamine D et bisphosphonates doit être discuté quel que soit le taux de testostérone.



3. La fertilité de l’homme après 50 ans

Le nombre d’hommes de plus de 50 ans qui divorcent et s’unissent à une femme plus jeune et souhaitent concevoir est en constante augmentation.
Le taux de divorce chez les quinquagénaires a doublé en 10 ans et le nombre d’hommes de plus de 50 ans qui deviennent père a augmenté de 40 % en 12 ans.
Il y a eu 8 526 enfants nés de père de plus de 50 ans en 2010, contre 6 043 en 1998 au Royaume-Uni.
Plus de 30 % des hommes conçoive pour la première fois après 35 ans.

De fait, les urologues reçoivent des hommes de plus de 50 ans préoccupés par leur fertilité dans le cadre d’un projet d’enfant avec une femme plus jeune.
Souvent, ceux-ci n’ont pas vraiment encore essayé mais ils souhaitent évaluer les chances et les risques afin de ne pas perdre de temps.

La question de la fertilité se pose aussi dans d’autres situations, comme la découverte d’un cancer de la prostate, chez un homme vivant avec une femme plus jeune, avec un désir d’enfant.


La fertilité des hommes diminue-t-elle avec l’âge ?

La fertilité des femmes, on le sait, décroît avec l’âge, jusqu’à devenir nulle à l’heure de la ménopause.

Ce que l’on sait moins, c’est que les chances de concevoir des hommes diminuent aussi au fil des ans.
Ainsi, les chances de conception dans les six mois décroissent de 2 % chaque année après le 24ème anniversaire du géniteur.
Et pour une grossesse dans un délai d’un an, les chances décroissent de 3 % chaque année.
Le recours à la procréation médicalement assistée (PMA) augmente avec l’âge maternel mais aussi paternel.
Par ailleurs, lorsqu’il y a grossesse, le risque de fausse couche spontanée augmente avec l’âge paternel.

Les caractéristiques du sperme mesurées par le spermogramme s’altèrent avec l’âge.

On note une diminution…

  • …du volume de l’éjaculat,
  • …de la mobilité des spermatozoïdes,
  • …de leur vitalité,
  • … et une augmentation des anomalies morphologiques (tératospermie).


Même si, en dehors du volume, les hommes de plus de 50 ans gardent des paramètres spermatiques dans les limites de la normale en général.

L’augmentation des risques pour l’enfant

La littérature recense l’augmentation de plusieurs risques, liée à l’âge du père.

Augmentation de la fréquence des trisomies, lorsque l’âge maternel est également élevé (plus de 35 ou 40 ans).

  • Augmentation de la fréquence des mutations génétiques, dont :
    - Achondroplasie (9) (x 7,5) ;
    - Craniosynostose (10) (x 9,5) ;

  • Augmentation du risque d’avoir des enfants autistes (11) entre 50 et 55 ans ont 2,2 fois plus de (4,4 fois plus après 55 ans) ;

  • Augmentation du risque d’avoir des enfants schizophrènes ;

  • Atteints de troubles bipolaires.


(9) http://www.orpha.net/consor/cgi-bin/OC_Exp.php?Lng=FR&Expert=15.0
(10) http://www.orpha.net/consor/cgi-bin/OC_Exp.php?Expert=1531.0&Lng=FR
(11) Les hommes qui ont un enfant (fille ou garçon) après 50 ans ont 1,7 fois plus de risque d’avoir un petit enfant autiste, comparé aux hommes qui ont leurs enfants entre 20 et 24 ans. Ceci est cohérent avec le fait que les mutations de novo impliquées dans l’autisme sont principalement d’origine paternelle, d’expression variable et avec un effet possiblement cumulatif sur plusieurs générations. (Sartorius G A and Nieshlag E. Human Reproduction Update, Vol.16, No.1 pp. 65–79, 2010, Frans et al JAMA Psychiatry. 2013 May ; 70(5): 516–521)


Que se passe-t-il au plan hormonal ?

L’âge avançant on note :

  • une diminution de la production de testostérone,
  • une augmentation FSH (hormone folliculo-stimulante),
  • une diminution de l’inhibine B liées à une altération fonctionnelle des tubes séminifères et des cellules de Sertoli.


On observe aussi une diminution de la vascularisation ainsi qu’une réduction du nombre des cellules de Sertoli et des cellules de Leydig, avec un épaississement de la membrane basale et une diminution de la production de spermatozoïdes.

La cumulation des phénomènes oxydatifs et épigénétiques environnementaux ainsi que le vieillissement des cellules germinales augmentent le risque de mutations de l’ADN spermatique.

Les altérations du fonctionnement de la prostate et des vésicules séminales peuvent, par ailleurs, être responsables de modification de la qualité du plasma séminal.


Comment évaluer les chances de concevoir ?

Un examen clinique des organes génitaux et de la prostate doit être réalisé chez un homme consultant pour une évaluation de la fertilité.

Cet examen clinique est complété par :

  • La réalisation d’un spermogramme (analyse du sperme avec numération des spermatozoïdes et évaluation de la proportion de spermatozoïdes anormaux) et d’un spermocytogramme (analyse des spermatozoïdes).

  • Une évaluation hormonale (Testostérone totale, FSH, LH).

  • Un écho-doppler du contenu scrotal à la recherche d’une varicocèle ou une tumeur est aussi recommandée.

  • Le dosage du PSA et une échographie prostatique et des voies séminales doivent être réalisées au moindre doute clinique.

  • L’évaluation de la fragmentation de l’ADN spermatique sera éventuellement réalisée, en cas d’échec des premières tentatives de PMA si l’on envisage un traitement antioxydant.



Les traitements : les chances de conception par procréation médicalement assistée (PMA) diminuent-elles avec l’âge du père ?

Il est aujourd’hui difficile d’affirmer que les taux de grossesses en PMA sont moins bons lorsque l’âge paternel augmente.

Les taux naissance en ICSI (fécondation in vitro avec l’injection d’un seul spermatozoïde dans l‘ovocyte) ne semblent, notamment, pas moins bons pour les hommes de plus de 50 ans que pour les autres (12).

Les antioxydants peuvent être proposés en cas de fragmentation de l’ADN augmentée mais aucune étude spécifique ne permet de penser qu’ils peuvent améliorer les altérations liées à l’âge.

(12) The effect of paternal age on assisted reproduction outcome. Dain L, Auslander R, Dirnfeld M. Fertil Steril 2011; 95: 1–8

CONCLUSION


On assiste donc à une évolution dans la prise en charge des couples infertiles qui doit prendre en compte l’âge paternel comme facteur de risque de malformations ou de troubles neuropsychiques chez l’enfant et la descendance.

Les limites, en ce qui concernent l’âge paternel, sont fixées librement par les centres de PMA entre 55 et 60 ans.

Des recommandations ne manqueront pas d’être éditées pour informer les hommes de plus de 50 ans qui souhaiteraient devenir pères.


4. Le coeur des hommes: l’urologue impliqué dans le dépistage, l’évaluation et la prévention du risque cardiovasculaire

Nombre d’hommes de plus de 50 ans consultent un urologue pour l’apparition d’une dysfonction érectile.
Or ce trouble de la sexualité peut être la manifestation de pathologies sous-jacentes, comme les maladies cardiovasculaires.

Un exemple de profil type :

  • Un homme de plus de 50 ans, consultant pour une dysfonction érectile d’apparition progressive.
  • Il occupe un poste à responsabilité dans une grande entreprise en cours de plan social.
  • Il a pris 10 kg depuis 2 ans.
  • Il a arrêté toute activité physique depuis longtemps.
  • Il fume depuis 30 ans.
  • Il a débuté un traitement pour une hypertension artérielle depuis quelques mois.


Derrière le symptôme sexuel, l’urologue doit identifier, à travers l’interrogatoire du patient, les facteurs de risques cardiovasculaires liés à des modes de vie ou antécédents.


Pourquoi s’intéresser au risque cardio-vasculaire, chez l’homme de plus de 50 ans ?

Les maladies cardio-vasculaires sont la première cause de mortalité dans le monde.
On estime à 17,3 millions le nombre de décès imputables aux maladies cardio-vasculaires, ce qui représente 30% de la mortalité mondiale totale.
Parmi ces décès, on estime que 7,3 millions sont dus à une cardiopathie coronarienne et 6,2 millions à un AVC (statistiques de 2008).

La dysfonction érectile (DE) a été identifiée comme un symptôme sentinelle de la maladie coronarienne et, d’une manière plus générale, des maladies cardiovasculaires.

L’étude ONTARGET réalisée sur plus de 1 500 hommes ayant des facteurs de risques cardio-vasculaires, a permis de conclure que la dysfonction érectile est un facteur prédictif très important d’événement cardio-vasculaire grave : le risque de survenue d’un décès de cause cardio-vasculaire ou d’infarctus du myocarde est multiplié par 2 chez les hommes souffrant de dysfonction érectile (13).

La DE serait par ailleurs, un symptôme sentinelle, d’un état précurseur du diabète de type 2 et de la maladie coronarienne avant l’apparition du syndrome métabolique, dont certains signes « visibles » comme l’obésité, manquent encore.

  • Ainsi, la dysfonction érectile précède en moyenne de 3 ans dans 70% des cas les symptômes cardiaques chez les hommes ayant des sténoses coronariennes.
  • Et 20% des hommes qui souffrent de DE ont des sténoses coronariennes asymptomatiques (14).


(13) Böhm et al Circulation 2010 Mar 30; 121(12): 1439-46
(14) Gandaglia et al Eur Urol 2013


Pourquoi les troubles de l’érection peuvent-ils révéler une pathologie cardio-vasculaire ?

La DE partagent avec les maladies cardiovasculaires des causes communes :

  • dysfonction endothéliale et l’athérosclérose,
  • obésité abdominale, diabète ou intolérance au glucose, hypertension artérielle, hypertriglycéridémie, hypercholestérolémie, l’ensemble de ces symptômes constituant le syndrome métabolique.



Comment évaluer le risque cardio-vasculaire ?

Les sociétés de cardiologie américaine et européennes viennent d’éditer les recommandations de conseils en matière de sexualité destinées aux patients souffrant d’affections cardiovasculaires (15).

En cas de facteur de risques cardiovasculaires et selon les recommandations de la conférence de Princeton, seuls les patients à faible risque peuvent reprendre une activité sexuelle et physique, donc bénéficier de la prescription d’un traitement de la dysfonction érectile. Il est habituel et facile d’identifier facilement ces patients qui sont capables de monter 2 étages sans s’arrêter.

Les patients dont l’état cardiovasculaire est instable ou grave doivent être pris en charge par un cardiologue et être équilibrés avant de pouvoir reprendre une activité physique (dans le cadre, par exemple, de la prévention de l’insulino-résistance) et sexuelle.
Il peut être également utile de demander l’avis du cardiologue.

(15) Steinke et al Circulation. 2013; 128:2075-2096
Physiopathologie de la dysfonction érectileAthéroscléroseModif. MorphologiquesAthéroscléroseModif. MorphologiquesHypertensionDyslipidémieDiabèteHypertensionDyslipidémieDiabèteAltérationrelaxation neurologiqueAltérationrelaxation neurologiqueInsuffisanceartérielleInsuffisanceartérielleDiminution flux artérielRetourveineuxexcessifDiminution artérielRetourveineuxexcessifDysfonctionCaverno-veineuseDysfonctionCaverno-veineuseAltérationvasodilatationArtèresTissucaverneuxAltérationrelaxationMuscle lisseAltérationvasodilatationArtèresTissucaverneuxAltérationrelaxationMuscle lisseSténoseartérielleArtèresTissucaverneuxAtrophiemusculairelisse-FibroseSténoseartérielleArtèresTissucaverneuxAtrophiemusculairelisse-FibroseModif. fonctionnellesDysfonctionendothélialeModif. fonctionnellesDysfonctionendothélialeAdapted from Saenz de TejadaI et al.In: Erectile dysfunction. Eds. A Jardinet al. 2000; 65–102.

Celui-ci pourra :

  • évaluer s’il est possible d’envisager de supprimer une prescription de dérivés nitrés (utilisés pour leurs propriétés vasodilatatrices, notamment, dans le traitement de la crise angineuse) qui contre-indiquent l’utilisation des médicaments de l’érection (IPDE5) ;
  • modifier un traitement antihypertenseur pouvant contribuer à la DE.



Prévention et éducation thérapeutique

La prise en charge des facteurs de risque est importante car les changements d’habitudes alimentaires, l’initiation d’une activité physique régulière, la perte d’un surpoids, l’équilibre du diabète, l’arrêt du tabagisme, le traitement de l’hypertension, d’une dyslipidémie permettent ou d’améliorer une dysfonction érectile déjà présente, ou de prévenir la survenue, réduisent à terme la morbidité cardiovasculaire.

Enfin, l’obésité et le syndrome métabolique sont fréquemment associés à une diminution des taux de testostérone au-dessous des valeurs normales, parfois associés à des symptômes spécifiques (diminution du désir sexuel, DE, ostéopénie).
Il est donc important de rechercher, chez ces hommes, un syndrome de déficit en testostérone qui compromet l’équilibre glycémique, génère des dysfonctions érectiles résistantes aux IPDE5 et augmente le risque de décès par cause cardiovasculaire.

Il est important d’informer le patient et de l’inviter à perdre du poids :

  • une perte de poids de 10% par exemple permet une amélioration de l’ordre de 30% de la fonction érectile ;
  • débuter une activité physique à la cinquantaine, lorsqu’il n’y a pas de contre-indications, permet de réduire le risque de survenue d’une DE d’environ 70%.


Le traitement de la dysfonction érectile est sans particularité chez ces patients, en dehors des précautions à prendre lors de la prescription des IPDE5 qui sont contre-indiqués pour les patients sous dérivés nitrés et pour ceux qui souffrent d’affections cardiaques non stabilisées.


CONCLUSION

La dysfonction érectile est un marqueur du risque cardio-vasculaire aujourd’hui reconnu.

Sa découverte chez un homme de plus de 50 ans doit conduire à une évaluation cardio-vasculaire, à la mise en place de mesure hygiéno-diététiques permettant de prévenir l’aggravation des lésions artérielles et de réduire la dysfonction endothéliale.

La prescription de médicaments sexo-actifs doit être associée à des conseils pour une pratique de l’activité sexuelle dans un cadre défini en fonction du degré de sévérité et de stabilité de l’affection cardiaque.




5. Santé mentale de l’homme : quand la plainte sexuelle masque une dépression, un stress au travail, des addictions (alcool, tabac)

Deux exemples de profils types :

  • Homme de plus de 50 ans consultant pour une dysfonction érectile survenue après un divorce.
  • Homme de plus de 50 ans consultant pour une anéjaculation avec anorgasmie apparue depuis le traitement d’une dépression suite à un licenciement. Il a été traité efficacement par un IPDE5 pour une dysfonction érectile par son médecin traitant, mais n’arrive toujours pas à avoir des orgasmes.



Pourquoi s’intéresser à la santé mentale de l’homme de plus de 50 ans ?

  • Environ 12% des hommes font un épisode dépressif majeur (EDM) au cours de leur vie (23% des femmes).
  • Les hommes de plus de 50 ans sont la classe d’âge la plus touchée par les épisodes dépressifs. (Enquête ANADEP 2005).

Les dysfonctions sexuelles, les maladies cardiovasculaires et la dépression ont en commun :

  • L’activation de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien et des modifications de la sécrétion de cortisol.
  • L’activation du système sympathique, la dysfonction endothéliale et la résistance à l’insuline que l’on trouve dans le syndrome métabolique et la mauvaise hygiène de vie.
  • L’activation de l’inflammation.



Quels sont les effets du traitement de la dépression sur la sexualité ?

Le traitement de la dépression…
… a un effet positif sur la satisfaction sexuelle pour environ un quart des patients ;
… n’a pas d’effet notable chez la moitié ;
… a des effets négatifs chez un quart.

Si l’on compare les différents antidépresseurs, les hommes qui prennent des inhibiteurs de la recapture de la sérotonine…
… ont un risque multiplié par 2 de diminution de la libido ;
… ont moins de rapports sexuels ;
… n’ont pas plus de problèmes d’érection ;
… ont sept fois plus d’éjaculations retardées ;
… ressentent un effet délétère sur l’auto-érotisme et la relation avec la partenaire (16).

(16) Corona et la JSM 2009

Les hommes traités par antidépresseurs et guéris de leur dépression se disent satisfaits sexuellement dans 80% des cas alors que seuls 58% des non-guéris sont satisfaits.
Les traitements de la DE (IPDE5) sont efficaces dans la grande majorité des cas pour améliorer la qualité des érections des patients dépressifs sous traitement.
La sévérité de la dépression a un impact négatif sur la réponse au traitement par IPDE5, mais la réponse aux IPDE5 à un impact positif sur la guérison de la dépression.


CONCLUSION

Il est important d’identifier les symptômes évocateurs de dépression, de troubles anxieux ou d’addictions (alcool, tabac, cannabis) chez les hommes de plus de 50 ans consultant pour des troubles de la sexualité.

La dépression doit être traitée jusqu’à la rémission et les dysfonctions sexuelles prises en charges.

Le choix molécule adaptée permet de limiter les effets secondaires sexuels [lire le Tableau 1 : Effets secondaires sexuels des médicaments, page suivante), ce qui contribue à anticiper la non-observance du traitement contre la dépression.]

Les troubles sexuels induits doivent être pris en charge.






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