Logement : Les propositions de Bernard Devert pour relancer l'habitat social

Bernard Devert - président fondateur du mouvement delutte contre le mal logement Habitat et Humanisme

Publié le 28 août 2014

Deux propositions :

  1. Le développement de l'épargne solidaire accompagnée d'une mobilisation de l'Investissement Social Responsable (ISR), observant - tout n'est pas sombre - l'intérêt que la finance solidaire suscite pour favoriser une économie où l'homme est enfin reconnu.

Le démembrement de la propriété est une des clés pour atténuer le mal logement.

Créons des foncières pour l'acquisition de tènements remis en usufruit à des bailleurs sociaux et associatifs, facilitant à coût maîtrisé la réalisation de programmes pour ceux qui, en raison d'un indigne 'reste pour vivre', sont éloignés - c'est un comble - du logement.

La fiscalité liée au démembrement de la propriété et à la finance solidaire doit impérativement s'inscrire dans la durée pour entraîner la mobilisation nécessaire afin que chacun ait un toit.

  1. L'aménagement du territoire revu avec la création des nouvelles Régions.

Personne ne peut feindre des centaines de milliers de logements sont inoccupés dans les villes moyennes. Les métropoles, plus riches quant à l'emploi, bâtissent paradoxalement les ruptures de cohésion sociale ; les rentes foncières conduisent à l'étalement des constructions, cause de l'éloignement des plus fragiles dans les périphéries.

Les services portés par le numérique qui se sont substitués à l'industrie ne permettent-ils pas d'envisager autrement l'organisation du travail ?

La rentrée s'affiche difficile sur le plan politique, économique et social ; elle le sera bien sûr pour les plus fragilisés. Souvenons-nous de l'expression si juste de la philosophe Simone Weil : « Ce n'est pas le chemin qui est difficile, mais le difficile qui est le chemin ».

La Nation doit s'interroger sur ce chemin qu'il n'est pas possible de déserter. Alors, pourquoi malgré bien des voix autorisées, le mal-logement n'a-t-il jamais été reconnu comme une grande cause nationale.

Pourquoi le logement est-il un enjeu politique oublié à la veille des élections, chacun saisissant avec crainte que prendre la question à bras le corps, c'est se mettre à distance des idées toutes faites, convenues à l'égard de ceux touchés par la grande pauvreté.

Qui ne voit pas le drame des taudis, de ces 'machines à loger' concentrant la misère avec comme corollaire une carte scolaire brisant l'égalité des chances. Faut-il le surgissement des émeutes pour voir clair ?

La Société est à la recherche d'un souffle ; offrons-lui celui de bâtir une fraternité, dans cette perspective de construire pour servir la cause de ceux oubliés, méprisés au point de n'avoir point de toit.

L'ouverture n'est jamais d'évidence ; il faut non seulement la volonté de la construire mais aussi le courage de l'assumer pour mettre au pas les logiques du court terme.

Ne soyons pas victimes d'une illusion que les mots entretiennent, répétant à l'envi un développement durable. Non à ces peurs liées à la différence qui entravent le seul débat d'avenir qui vaille, celui de l'école de la fraternité pour un mieux 'vivre ensemble'.

Travaillons à cette valeur de la République pour offrir à la démocratie le sens qui la fera durer.

Bernard Devert, prêtre et entrepreneur social

Entrepreneur, Bernard Devert l'a été très jeune. Après des études de droit et un début de carrière dans une grande régie immobilière lyonnaise, il créée sa propre société de promotion. Il a alors 36 ans, de l'énergie à revendre et un fort désir de faire pousser des immeubles ! Mais déjà, ses convictions profondes l'ont porté vers un autre chemin, celui de la prêtrise. A 40 ans, il est ordonné, et décide de mettre en cohérence son nouveau statut et sa nature profonde d'entrepreneur. C'est ainsi qu'est créé le mouvement Habitat et Humanisme, avec l'ambition d'innover dans la production de logements pour concilier efficacité économique et utilité sociale, en l'occurrence, augmenter l'offre locative très sociale.

L'économique au service du social

La première opération est emblématique de l'intuition qui guide encore Bernard Devert aujourd'hui : utiliser les mécanismes de l'économie de marché et faire appel à l'épargne individuelle afin de répondre à un besoin social fort. Un premier immeuble fut ainsi acheté, en 1986 par une SCI constituée de quelques particuliers ayant décidé d'investir pour loger des personnes à faibles ressources dans le centre-ville de Lyon.

La Foncière, une SA solidaire

Plus tard, la SCI est transformée en SA en commandite par action: la Foncière d'Habitat et Humanisme, afin d'élargir son champ d'action, à fin 2012, son patrimoine est de 2 456 logements répartis sur toute la France et situés dans des quartiers équilibrés, dans les cœurs des villes. Le capital de la Foncière, de 100 M€, appartient pour plus de la moitié, à des particuliers qui sont devenus actionnaires lors d'une augmentation de capital visée par l'AMF. Ces investisseurs solidaires acceptent une faible rentabilité de leur investissement compensée par sa forte utilité sociale et des avantages fiscaux. Des Fonds d'Epargne Salariaux investissent également dans la Foncière qui est agréée « entreprise solidaire ».

Innovation et entrepreneuriat social

Sous l'impulsion de son fondateur, Habitat et Humanisme a placé l'ensemble de son action sous le signe de l'innovation et de l'entrepreneuriat social :

- L'association est un des pionniers de l'épargne solidaire et propose une gamme de produits (livrets, FCP, assurance-vie) pour lesquels l'épargnant partage une partie des intérêts de son placement.

- Pour augmenter son offre de logements, elle propose des solutions pour les propriétaires de biens immobiliers afin de concilier tranquillité de gestion, et avantages fiscaux.

- En matière d'habitat, Habitat et Humanisme innove également : elle a ouvert 37 pensions de familles, structures d'habitat semi-collectif pour personnes isolées et en grandes difficulté, dont elle a fait partie des projets pilote, dès 1997. Aujourd'hui sont expérimentés des projets d'habitat intergénérationnel dont l'objectif est de réunir au sein d'un même logement (colocation) ou immeuble, des personnes fragilisées, d'horizons, d'âges et de situations différentes pour créer des occasions de liens et de solidarités de proximité.

Un entrepreneur social atypique

A 66 ans, Bernard Devert est un entrepreneur social atypique mais tenace, qui a toujours autant d'énergie et d'envie d'entreprendre ! Son impatience est à la mesure des inégalités et de la fracture sociale du pays. Son credo n'a pas changé, proposer des solutions économiques innovantes pour produire du logement accessible aux plus modestes et aux plus fragiles, quitte à faire bouger les lignes traditionnelles de l'entreprise et de la solidarité.


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