Valérie Pécresse, Ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, a reçu aujourd'hui le rapport du professeur Manuel Tunon de Lara, Président de l'université de Bordeaux 2, suite à la mission sur les nouveaux métiers du secteur des technologies de la santé qu'elle lui avait confiée en juin 2009.
La ministre a souligné le remarquable travail mené par Manuel Tunon de Lara, fondé sur une large consultation des acteurs de la communauté université, des industries du médicament et des biotechnologies, et des professionnels de santé non seulement en France, mais aussi à travers toute l'Europe et aux Etats-Unis, par l'intermédiaire des ambassades qui ont également été sollicitées. Elle a indiqué que ce rapport constitue à ce jour la plus large prospectivesur les formations capables de répondre aux futurs métiers des industries de santé.
Valérie Pécresse a souligné que les conclusions de cette mission ont permis de mettre en avant un constat clair : pour garantir la compétitivité, mais surtout l'attractivité de notre pays pour les innovations, les stratégies industrielles et les nouveaux métiers dans des domaines tels que la nanomédecine, la nanotoxicologie, la bioinformatique, la neuro-ingéniérie par exemple, il faut innover en matière de formation, mais travailler davantage encore sur les collaborations entre recherche universitaire et la recherche privée. Le défi est donc double : il s'agit de décloisonner les cursus et professionnaliser les enseignements par le développement de l'apprentissage notamment, mais aussi de rassembler industriels et universités autour de plateformes partagées de recherche et de formations en sciences du vivant et de la santé.
Au regard de ce constat, Valérie Pécresse a retenu en particulier deux séries de propositions très innovantes permettant de développer les collaborations entre recherche publique et recherche privée.
Tout d'abord, Valérie Pécresse a demandé aux universités de faire des propositions de cursus innovants, sur le modèle de ce qui a été mis en placeà Grenoble ou Bordeaux. A Grenoble, l'école de biotechnologies, au sein de l'Université Joseph Fourrier, a signé des accords de partenariats avec les PME locales permettant à ses étudiants de trouver facilement des stages correspondant à leurs attentes, et aux industriels de recruter de nouveaux talents répondant à leurs besoins. A Bordeaux, Manuel Tunon de Lara mettra en place à la rentrée, grâce là aussi à des accords avec des industriels, un cursus alterné en biosanté industrielle, de niveau M mais avec une insertion professionnelle à Bac+3, qui permettra l'acquisition de compétences industrielles pendant plusieurs années, puis le retour à l'université pour l'obtention d'un master permettant ainsi une évolution de carrière dans l'entreprise. Ce cursus pourrait s'appuyer sur le futur L1 santé et contribuer ainsi à la diversité des orientations. La ministre a indiqué que la mise en place de ces cursus serait évaluée par l'AERES, dans le cadre plus général de l'évaluation des universités.
Ensuite, la ministre a annoncé la création d'un centre de ressources virtuel des métiers des industries de santé permettant d'établir une carte nationale des formations. Il s'agit, avec l'aide des Entreprises du Médicament (LEEM), de réaliser une cartographie des formations existantes à l'échelle nationale, pour mieux les développer et les adapter aux métiers des industries de la santé et aux besoins pointus et croissants de certains domaines spécifiques d'activité. A cette fin, Valérie Pécresse a demandé à la Direction Générale de l'Enseignement Supérieur et de l'Insertion Professionnelle d'organiser la mise en place de ce centre de ressources virtuel dans les 6 mois. Sous forme de portail internet, ce centre de ressources sera destiné autant aux étudiants qu'aux industriels, et s'appuiera d'une part sur le travail de l'ONISEP et son GeoPortail des formations et d'autre part sur l'Observatoire des métiers de la santé mis en place par le LEEM. A terme, l'objectif sera de disposer d'un outil de cartographie de ce type dans tous les secteurs industriels, au-delà des secteurs spécialisés dans les métiers de la santé.
Valérie Pécresse a indiqué qu'un point d'étape sur ces engagements serait effectué avec la communauté universitaire et les industriels d'ici la fin de l'année 2010.
Détails des recommandations du rapport de Manuel Tunon de Lara
Recommandation 1 : Développer et promouvoir l'excellence dans les sciences de la vie et de la santé.
Si la plupart des observateurs s'accordent à reconnaitre la qualité de la formation française en sciences de la vie et de la santé, beaucoup insistent sur le nécessaire soutien et sur le développement de l'enseignement de certaines disciplines fondamentales comme la biologie moléculaire, la biochimie ou la pharmacologie sur lesquelles reposeront les stratégies industrielles. Cette recommandation, appuyée par beaucoup d'universitaires est indissociable d'une stratégie visant à faire des sciences du vivant une priorité nationale en termes de recherche et de formation, comme cela est le cas dans différents pays technologiquement avancés.
Recommandation 2 : Décloisonner les cursus de formations, exploiter les interfaces et favoriser les multicompétences.
Beaucoup d'industriels insistent sur la nécessité d'exploiter les interfaces et de multiplier les compétences. Cela peut avoir des conséquences stratégiques au plan universitaire en favorisant l'émergence de formations multidisciplinaires au carrefour de certains domaines de la médecine, de la biologie et de l'ingénierie. Bien souvent, il s'agirait également de pouvoir adjoindre à une formation technico-biologique, un enseignement ouvert sur le monde de l'entreprise, l'économie et la gestion, les aspects règlementaires. D'une manière plus générale, il est certain que nous devons décloisonner les formations, quel que soit le niveau d'étude, et que les jeunes diplômés affichant différents types de compétences seront très recherchés sur le marché du travail.
• S'appuyer sur les vecteurs d'innovation exprimés par les industriels et favoriser ainsi l'émergence de formations multidisciplinaires au carrefour de certains domaines : Nanomédecine, Nanotoxicologie, Bioinformatique, Biomimétique, Neuro-ingéniérie, Biorobotique, Nanotechnologie et galénique (B. Lindet)...
• Harmoniser cette nouvelle offre de formation au niveau du territoire pour éviter les redondances, faciliter les complémentarités et rester adapté aux possibilités d'insertion professionnelle.
• Inclure dans la formation initiale en biosanté, des modules d'enseignement sur les aspects économiques, éthiques, et règlementaires de la recherche publique et privée.
• Favoriser l'apprentissage sur le modèle d'équipes projet, pluridisciplinaires et multi-niveaux (L, M, D).
• Promouvoir les doubles cursus, comme médecine et sciences (MD-PhD), business et biologie, sciences humaines et biologie, en optimisant les durées d'étude et inciter à la réalisation de parcours mixtes (recherche publique, recherche privée, carrières hospitalières et universitaires).
Recommandation 3 : S'appuyer sur quelques plateformes de recherche et formation en sciences du vivant et de la santé
La nécessité d'acquérir de multiples compétences dans ces domaines, le besoin pour ces formations de grands équipements et d'infrastructures souvent mutualisées ainsi que l'intérêt d'une proximité géographique avec le tissu industriel conduisent à porter notre effort sur quelques plateformes de formation, bien identifiées sur le territoire, auxquelles pourront s'adresser les industriels. Cela suppose d'associer à ces grands pôles de biosanté les structures de plus petite taille à travers une forme de réseau. Surtout, cette stratégie implique, comme cela est actuellement fait dans le domaine de la recherche avec l'Alliance pour les Sciences de la Vie et de la Santé, une lecture nationale de la carte des formations facilitant les complémentarités et évitant les redondances.
• Un spectre suffisamment large de compétences pour assurer des formations réellement multidisciplinaires.
• Des laboratoires de recherche de haut niveau dans le domaine des sciences de la vie et de la santé et dans les disciplines susceptibles de contribuer aux grandes avancées techniques et scientifiques (chimie, physique, optique, informatique,...).
• Des infrastructures et des équipements lourds mutualisés pour permettre la formation d'étudiants de différents niveaux d'étude aux technologies les plus avancées .
• Un tissu industriel suffisant de grandes entreprises et/ou de PME dans le domaine du médicament, des biotechnologies et du matériel et dispositifs médicaux, idéalement connecté à un pôle de compétitivité.
Recommandation 4 : Organiser et partager l'offre et la demande des formations au sein d'un institut virtuel des métiers de la santé.
En complément de cette forme d'organisation, nous devons porter notre effort sur la lisibilité des formations et demander aux industriels de mieux exprimer leurs besoins. Au-delà d'un travail d'identification qu'il faudrait mener à court terme, différentes solutions techniques sont envisageables pour atteindre cet objectif (institut virtuel, portail internet, banque d'offre et de demande). Les difficultés que l'on peut pressentir sont l'hétérogénéité et le nombre des formations (en particulier dans le domaine des biotechnologies), la pérennité des mises à jour, la volonté des industriels d'exprimer certains besoins parfois concurrentiels.
Recommandation 5 : Créer de nouveaux dispositifs de rapprochement universités - entreprises au service de la formation initiale et tout au long de la vie.
Ces différentes orientations nécessitent d'opérer, en parallèle, un réel rapprochement universités-entreprises. Différents dispositifs existent déjà et ces relations évoluent dans le bon sens. Néanmoins, il me paraît souhaitable d'impliquer plus directement nos partenaires industriels peut-être à travers des conventions spécifiques sur le modèle de celles déjà signées entre le LEEM et les universités. Parallèlement aux engagements qui peuvent être pris en termes de formation, certains dispositifs innovants permettraient d'enrichir ce rapprochement.
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