Créée en 2006 à l'Institut de France, La Fondation Unité-Guerra-Paul-Baudoin-Lambrecht-Maïano a pour objet principal de soutenir la lutte contre la douleur.
Pour cela, elle aide des équipes médicales qui cherchent à améliorer les soins et développent la mise en place de soins palliatifs aux malades.
Elle décerne chaque année un prix d'un montant de 15 000 euros dans le domaine de la lutte contre la douleur.
Prix et lauréat 2013
Le Prix 2013 est remis à Sophie Pezet, maître de conférences en Physiologie à l'École supérieure de Physique et de Chimie industrielles (ESPCI-ParisTech) de la ville de Paris (Laboratoire de Plasticité du Cerveau, CNRS UMR 8249), pour son projet de recherche portant sur l'« Étude de la plasticité neuronale au cours de la douleur chronique ».
Sophie Pezet a consacré ses recherches à la mise en évidence des mécanismes cellulaires et moléculaires spinaux et supra-spinaux à l'origine de la plasticité neuronale intervenant dans les douleurs chroniques de type inflammatoires ou les névralgies périphériques.
Elle a mis en évidence le rôle majeur des neurotrophines et de leurs récepteurs dans la sensibilisation douloureuse et le passage à la chronicité, tant au niveau périphérique que cérébral. Elle a démontré également que ces neurotrophines activent le récepteur au glutamate, neurotransmetteur impliqué dans la transmission douloureuse intracérébrale, résultat des modifications des structures du neurone, dont la multiplication des épines dendritiques à l'origine de l'hypersensibilité douloureuse.
Ce prix lui est décerné aussi bien pour son parcours scientifique, l'étendue de ses connaissances en biologie cellulaire et en neuropharmacologie expérimentale que pour l'originalité de ses découvertes dans le domaine de la douleur.
Précédents lauréats
Travaux de recherche réalisés et résultats obtenus
Après l’obtention de son Diplôme Universitaire de Technologie en 1992, Sophie Pezet a travaillé dans l’équipe dirigée par Alain Harf (INSERM U 296) comme Assistante Ingénieur sur l’implication des protéinases de la matrice extracellulaire dans les pathologies pulmonaires.
Son travail a donné lieu à plusieurs publications.
Elle a ensuite obtenu une Licence, une Maîtrise de Biologie Cellulaire et Physiologie, puis un DEA en Neurosciences (Pierre et Marie Curie Paris VI).
Travaux de recherche dans le domaine de la douleur
Les pathologies douloureuses chroniques sont dues à des remaniements du système nerveux central, que l’on nomme ‘plasticité neuronale’.
Ces phénomènes prennent place suite à une inflammation périphérique ou une lésion nerveuse du système nerveux périphérique ou central.
Au cours de sa thèse, puis au cours de son stage post-doctoral, Sophie Pezet a étudié l’implication de divers facteurs ou voies de signalisation intracellulaire dans ces mécanismes de plasticité neuronale, au niveau spinal (c’est-à-dire dans le premier relais neuronal de ces voies).
Elle a montré, au cours de sa thèse, que le facteur neurotrophique NGF (Nerve Growth Factor), via la sur-expression de son récepteur à haute affinité, était responsable de la plasticité des neurones de la voie spino-réticulaire, dans un modèle de douleur chronique inflammatoire.
Dès la fin de sa thèse (début 2000), elle a intégré le laboratoire dirigé par le Professeur Stephen B. McMahon (King’s College, Londres) où elle a initialement travaillé sur l’hypothèse selon laquelle un facteur neurotrophique, le BDNF (Brain-Derived Neurotrophic Factor), pouvait être un neuromodulateur pro-nociceptif dans la corne dorsale de la moelle épinière (CDME).
Afin d’étudier cette hypothèse, Sophie Pezet a développé une technique d’étude de l’état phosphorylé du récepteur à haute affinité du BDNF (TrkB).
Dans ce travail, elle a montré qu’un stimulus nociceptif pouvait induire dans la CDME la libération du BDNF par les fibres afférentes primaires, l’activation de son récepteur TrkB dans les neurones post-synaptiques et l’activation en aval de la kinase ERK1/2, activation importante dans le développement de l’hyperalgie. Elle a montré ensuite, que les récepteurs NMDA, mais pas les récepteurs AMPA, étaient également impliqués dans ces mécanismes qui intervenaient à tous les niveaux de la moelle épinière.
Ce travail séminal a contribué à la reconnaissance internationale de son travail dans le domaine de la douleur et lui a permis d’organiser en 2007 et 2011 deux congrès internationaux (avec la collaboration de la société Abcam) sur divers aspects de la recherche fondamentale ou translationnelle sur la douleur.
En décembre 2002, elle a été recrutée par le « London Pain Consortium » constitué de neuf laboratoires londoniens travaillant dans le domaine de la douleur.
À partir de 2003, Sophie Pezet s’est intéressée à l’implication de certaines voies de signalisation intracellulaire dans le développement ou le maintien de la douleur.
Dans un premier projet, elle a étudié l’implication de la sérine/thréonine kinase Akt dans les systèmes sensoriel et nociceptif adultes et a montré que l’activation d’Akt était régulée par l’activité neuronale.
Plus tard, elle s’est intéressée à l’implication de la voie PI3K-Akt dans les mécanismes de plasticité spinaux liés à la douleur persistante, dite de « sensibilisation centrale ».
Au retour de son stage postdoctoral en 2007, elle a intégré le laboratoire de Neurobiologie de l’ESPCI, initialement dans l’équipe « Physiologie des interneurones du cortex cérébral » dirigée par le professeur Jean Rossier (puis en 2011 dans celle de Zsolt Lenkei « Biologie systémique du neurone »).
Elle y a développé et caractérisé un modèle animal de douleur persistante associée à la sclérose en plaque. D’autre part, avec Bernard Calvino, elle a étudié les mécanismes corticaux sous-tendant la douleur iatrogène induite par certains agents anti-cancéreux : la Vincristine ou l’oxaliplatine.
En collaboration avec Isabelle Férézou (CNRS, experte en imageries cérébrales chez le petit animal dite « intrinsèque » ou par « imagerie sensible au potentiel »), elle a étudié la plasticité fonctionnelle du cortex cérébral de souris souffrant de douleur neuropathique dans la sphère orofaciale.
Dans ce travail, dont l’article est en cours de préparation, elle démontre certains des mécanismes fonctionnels aboutissant à l’hyperexcitabilité corticale et au réarrangement de la carte corticale, élément fondamental pour mieux comprendre la douleur chronique des membres fantômes chez l’homme.
Enfin, depuis son intégration dans l’équipe de Zsolt Lenkei, elle s’intéresse aux mécanismes de plasticité structurale à court terme intervenant dans le cortex cérébral chez l’adulte, dans des pathologies du système nerveux, comme la douleur persistante ou un modèle animal de type « schizophrenia-like ».
Utilisant des techniques variées et complémentaires comme les approches cellulaires, moléculaires, anatomiques et comportementales, alliées aux développements d’imagerie du cerveau (grâce à une collaboration avec des physiciens de l’institut Langevin à l’ESPCI), elle a publié récemment que l’exposition chronique ou aigue au cannabis induisait une plasticité neurochimique et anatomique du cerveau de rongeur.
Elle étudie actuellement les mécanismes cellulaires et moléculaires de ces changements ainsi que ceux observés dans le cortex cingulaire antérieur dans un modèle animal de douleur inflammatoire.
10 principales publications
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