Mission préparatoire à l’expérimentation de la réintégration du budget médicaments dans le forfait soins des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes.
L’idée force, poursuivie dans les expérimentations de l’article 64 de la Loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2009, est qu’on peut limiter le risque iatrogène en coordonnant l’action des professionnels de santé autour du résidant en Ehpad (pharmaciens officinaux, médecins coordonnateurs, infirmiers coordonnateurs, médecins libéraux prescripteurs), tout en régulant la consommation de médicaments. L’introduction en 2005 du médecin coordonnateur dans les Ehpad, compétent en gérontologie, correspondait déjà à un objectif de santé publique. L’implication d’un nouvel acteur de santé, le pharmacien référent, permettra d’aller plus loin dans la bonne utilisation du médicament.
Aujourd’hui, dans les Ehpad ne disposant pas d’une pharmacie à usage intérieur (PUI), l’assurance maladie rembourse les médicaments aux résidants dans les mêmes conditions que s’ils étaient à leur domicile. Et comme les recommandations de bonne pratique, lorsqu’elles existent, ne sont pas ou peu appliquées – pas plus en Ehpad qu’à domicile, d’ailleurs – il n’y a aucune garantie d’une utilisation optimale des ressources collectives ou d’une optimisation en termes de santé publique. Le nouveau mode de financement des médicaments (réintégration du poste médicaments dans le forfait soins des Ehpad) est une incitation à réguler et à optimiser la consommation pharmaceutique dans le contexte d’une nécessaire maîtrise des dépenses de santé.
Les expérimentations prévues par la LFSS pour 2009 vont débuter à l’automne 2009.
L’expérimentation ne consiste pas à modéliser le fonctionnement des Ehpad sur la base d’un échantillon représentatif d’établissements. En revanche, elle doit permettre d’avoir une diversité suffisante de situations tant en termes de statut d’établissements (public, privé non lucratif, privé commercial), que de localisation (urbaine, rurale) et de capacité d’accueil. Aussi proposons-nous de constituer un échantillon de 360 Ehpad comme suit:
Statut des Ehpad:
=> Public
Moins de 60 places:
30 ruraux + 30 urbains
60 places et plus:
30 ruraux + 30 urbains
Statut des Ehpad:
=> Privé non lucratif
Moins de 60 places:
30 ruraux + 30 urbains
60 places et plus:
30 ruraux + 30 urbains
Statut des Ehpad:
=> Privé commercial
Moins de 60 places:
30 ruraux + 30 urbains
60 places et plus:
30 ruraux + 30 urbains
Il sera également constitué un échantillon témoin de 50 Ehpad.
La loi définit un nouveau rôle au pharmacien d’officine : celui de pharmacien référent. Le référent est unique pour un établissement donné et il n’est pas nécessairement le (ou l’un des) pharmacien(s) dispensateur(s) des médicaments aux patients de l’Ehpad. L’expérimentation devra prendre en compte les différents cas de figure. Il ne faut pas se masquer qu’il s’agit là d’une des difficultés de l’exercice. Quand l’Ehpad contractera avec un seul pharmacien, ce dernier sera à la fois référent et dispensateur mais quand plusieurs pharmaciens officinaux interviendront en Ehpad, on ne sait pas comment les rôles se répartiront. L’expérimentation permettra de préciser ce point.
Si la participation du pharmacien référent à l’élaboration de la liste des médicaments préférentiels est clairement mentionnée dans la loi, la « bonne gestion » et le « bon usage des médicaments destinés aux résidants » n’explicitent pas ses autres missions.
On peut considérer toutefois que ses tâches pourront comprendre dans la pratique:
- la transmission des prescriptions des patients vers l’officine,
- la vérification de la bonne prescription (posologie, contre-indication, interactions,..),
- le travail en coordination avec les autres professionnels de santé autour du patient,
- la formation et l’information des professionnels de santé sur les nouveaux traitements,
- la gestion des médicaments non utilisés et la vérification des lots périmés.
L’implication du pharmacien référent dans l’Ehpad doit correspondre à un nouveau service de santé rendu à l’établissement et aux résidants. Le pharmacien référent définira avec précision son implication dans l’établissement, ses missions et le temps qu’il y consacrera. Ce service et le temps consacré par le pharmacien référent d’Ehpad seront valorisés.
L’expérimentation prévoira explicitement une rémunération du pharmacien référent (fixé par la circulaire du 6 août 2009 à hauteur de 0,35€ par résidant et par jour et qui fera I'objet d'un abondement spécifique à la dotation soins de l'EHPAD.)
Le chiffrage le plus récent et le plus complet conduit à une dépense de médicaments par jour et par résidant de 4,12€ (source CNAMTS 2009). Dans le système actuel de tarification du médicament, l’assurance maladie prend à sa charge 3,52€ par jour et par résidant, soit 85,4% de la consommation remboursable. Le reste à charge de 0,6€ par jour et par résidant est à la charge de l’assuré ou, le cas échéant, pris en charge par sa complémentaire maladie.
Dans le nouveau mode de financement qui résultera de la réintégration des médicaments au forfait soins des Ehpad, il y a une analogie avec le système de financement des Ehpad qui disposent d’une Pharmacie à usage intérieur et l’intégralité de la dépense de médicaments sera à la charge de la collectivité sans reste à la charge pour le résidant. Cette amélioration de l’accès aux soins des assurés se traduira par un surcoût pour l’assurance maladie, et par une économie pour les organismes de protection complémentaire . La question de cette nouvelle répartition des charges entre l’assurance maladie obligatoire et l’assurance maladie complémentaire devra être évoquée. Il conviendra d’associer les organismes de protection sociale complémentaire à l’évaluation des montants transférés entre l’enveloppe soins de ville et l’enveloppe médico-sociale.
Le chiffre de 4,12€ servira de base au calibrage de l’enveloppe moyenne à transférer aux Ehpad lors de la généralisation de la mesure.
Il ne nous paraît pas souhaitable de rechercher pour le démarrage de l’expérimentation une méthode d’allocation fine Ehpad par Ehpad, d’autant plus que le chiffre de base correspond à une pratique non optimisée de la prescription pharmaceutique.
Aussi est-il proposé de calibrer le transfert d’enveloppe de chaque Ehpad expérimentateur sur la base de sa consommation pharmaceutique « historique » observée par l’assurance maladie au cours du premier semestre 2009. En tout état de cause, l’expérimentation sera faite en garantissant l’enveloppe financière « médicaments » des Ehpad.
Dans la mesure où la totalité des résidants ne disposent pas d’une complémentaire santé, on ne peut pas assimiler stricto sensu surcoût pour l’assurance maladie obligatoire et économie pour l’assurance maladie complémentaire.
Pour évaluer l’expérimentation et mesurer l’effet de la coordination entre les acteurs de santé, nous retiendrons des indicateurs simples, issus de travaux préalables du Collège Professionnel des Gériatres Français et de la Haute Autorité de Santé. Ces indicateurs font actuellement l’objet d’une concertation large incluant les prescripteurs (médecins généralistes, gériatres, cardiologues et psychiatres notamment), ce qui facilitera leur appropriation par les professionnels de santé. Leur publication par la HAS et les organisations professionnelles est programmée fin 2009.
Pour chaque prescription seront relevés les 12 items suivants :
1) L’ordonnance est structurée par domaine pathologique (Oui/Non)
2) Elle ne comprend pas 2 médicaments dont l’association est absolument contre-indiquée (Oui/Non)
3) Elle indique la clearance de la créatinine (Oui/Non)
4) Elle précise la durée de prise pour chaque médicament (Oui/Non)
(Les indicateurs 1, 2, 3, 4 sont des indicateurs qualitatifs relatifs aux règles générales de bonne prescription mesurables sur l’ordonnance)
5) Elle ne comprend pas plus de 2 psychotropes
6) Elle ne comprend pas plus de 2 diurétiques
7) Elle ne comprend pas plus de 3 antihypertenseurs
(Les indicateurs 5, 6, 7 sont des indicateurs qualitatifs d’alerte iatrogénique mesurables sur l’ordonnance)
8) L’ordonnance ne comprend pas de médicament absolument contre indiqué au patient (Oui/Non)
9) L’ordonnance ne comprend pas de médicament sans indication documentée dans le dossier (Oui/Non)
10) L’ordonnance correspond au traitement noté dans le dossier (Oui/Non)
11) L’ordonnance comprend les médicaments nécessaires à la prise en charge des pathologies à traiter au regard des éléments du dossier médical (Oui/Non)
12) En cas de prescription de neuroleptiques chez le patient Alzheimer,
l’indication a été confirmée (Oui/Non) (l’indicateur d’alerte iatrogénique du plan Alzheimer est le pourcentage de patients Alzheimer sous neuroleptiques)(Les indicateurs 8, 9, 10, 11, 12 sont des indicateurs de maitrise du risque iatrogénique mesurables sur l’ordonnance couplée à une discussion collégiale avec le prescripteur)
Pour chaque résidant seront analysées les prescriptions pharmaceutiques à trois périodes:
- au démarrage de l’expérimentation (à J0),
- à J0 + 6mois
- à J0 + 12 mois.
De plus on retiendra un indicateur synthétique, le nombre moyen d’unités (boites, flacons, etc.) prescrites au sein de l’Ehpad (nombre moyen annuel d’unités prescrites par résidant).
Il appartiendra également aux Ehpad d’enregistrer la consommation de leurs résidants à partir des prescriptions faites par les médecins. Ces prescriptions transiteront des Ehpad aux pharmaciens d’officine pour la fourniture des médicaments. L’information existera donc dans les Ehpad et dans les pharmacies.
Il est proposé que les données nécessaires au calcul de l’indicateur soient obtenues à partir des informations recueillies par le système Pharmastat des pharmaciens d’officine.
Il conviendra également de suivre les dépenses de médicaments de l’établissement, par produit ou catégorie de produits.
Un comité composé d’un représentant
- de chaque fédération d’Ehpad
- de chacun des trois syndicats de pharmaciens officinaux (FSPF, UNPF, USPO)
- de la FFAMCO,
- de la Direction générale de l’action sociale,
- de la Direction de la Sécurité sociale,
- de la Direction générale de la Santé
- de la Caisse nationale de la solidarité et de l’autonomie,
- de la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés,
- de la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole
- de la Société Française de Gériatrie et Gérontologie
assurera le suivi de l’expérimentation. Ce comité sera présidé par le responsable administratif chargé de préparer le rapport d’évaluation que le Gouvernement doit remettre au Parlement avant le 1er octobre 2010.
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