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Parcours Patient :

parcours du combattant ?

Publié le 29 septembre 2021

En France, le parcours des patients est devenu un véritable parcours du combattant : quel professionnel aller voir ? Qui détient mon dossier médical ? Que faire en amont de ma consultation ? En aval ? Par exemple, un patient atteint de syndromes parkinsoniens doit consulter en moyenne 30 intervenants et gérer autant de rendez-vous.


Face à ce constat, des solutions existent. C'est pourquoi l'Institut Montaigne publie aujourd'hui la note Parcours patient : parcours du combattant ?. Sur la base de trente auditions, Angèle Malâtre-Lansac, directrice déléguée à la Santé de l'Institut Montaigne, y formule des propositions concrètes pour rendre les parcours patients plus fluides et personnalisés, notamment en faisant entrer le numérique dans les pratiques médicales et le quotidien des patients.


«Si la crise sanitaire a montré la résilience des acteurs de terrain, elle a aussi levé le voile sur l'opacité de notre système de santé, la multiplication des structures et les fonctionnements en silo. Alors que plus de 30 milliards d'euros ont été mis sur la table à l'occasion du Ségur de la santé et du Conseil stratégique des industries de santé (CSIS), et que 53 % des Français considèrent que la santé devrait être un enjeu « tout à fait prioritaire » dans la campagne présidentielle de 2022, il est essentiel de se saisir cette fenêtre d'opportunité inédite pour repenser la place du patient dans le système et son expérience»
précise Angèle Malâtre-Lansac, directrice déléguée à la Santé à l'Institut Montaigne et auteure de cette note.

Les propositions de l'Institut Montaigne pour construire les parcours de soins de demain

Ces propositions visent à repenser les parcours patients afin de faciliter l'accès aux soins, d'autonomiser les patients et de suivre une logique de prise en charge globale incluant une dimension de prévention mais aussi d'accompagnement en amont et en aval en cas d'épisode de soins.

1. Faire de la qualité des soins une priorité

«La qualité des soins est très hétérogène en France et le manque d'information sur cette qualité est un véritable frein à l'amélioration de notre système de santé alors même que les patients sont très demandeurs de pouvoir choisir leur professionnel ou leur établissement sur des critères objectifs» précise Angèle Malâtre-Lansac. Ainsi, des indicateurs relatifs à la qualité des soins construits avec les parties prenantes (professionnels et patients) doivent être développés et systématisés. Toute réforme de l'organisation des soins doit être pilotée à travers le prisme de la qualité et de la pertinence des soins et pour ce faire, des données sur la qualité doivent être recueillies de façon systématique - y compris auprès des patients, en s'inspirant des meilleures pratiques internationales.

2. Mettre les ressources humaines au cœur de la transformation des parcours

Pour Angèle Malâtre-Lansac, «le digital ne constitue qu'un outil au service des parcours de soins. L'investissement massif sur le capital humain est prioritaire pour une meilleure organisation et une meilleure expérience pour les patients et les professionnels». Cet investissement doit encourager l'attractivité des métiers de la santé et passer par des actions de formation vis-à-vis des professionnels de santé davantage tournées vers la e-santé, les data, le management. Pour augmenter l'attractivité des métiers du soin, plusieurs pistes existent au-delà des rémunérations : multiplier les passerelles entre professions et les formations regroupées, favoriser les délégations de tâches, accompagner les déroulés de carrière notamment pour les infirmiers qui jouent un rôle central dans notre système de santé.

3. Garantir la sécurité, l'accès et la portabilité des données de santé

Il est essentiel de garantir la sécurité comme la portabilité et l'interopérabilité des données de santé afin de faciliter le quotidien des soignants ; de permettre aux patients de changer de professionnel ou d'établissement sans perte d'information et de faciliter la recherche et l'évaluation. Pour favoriser la confiance des citoyens et des professionnels de santé, la France comme l'Europe doivent développer une « troisième voie » autour des données de santé, en mettant l'éthique et la compétitivité au cœur du déploiement, de la gouvernance, du partage et de l'usage des données de santé. La Présidence française de l'Union européenne en 2022 peut constituer une opportunité unique de porter ce sujet auprès de nos partenaires européens.

4. Faciliter l'accès à des solutions numériques adaptées aux besoins des patients


Si les startups de la e-santé se multiplient, l'utilisation des innovations digitales par les professionnels de santé comme par les patients reste encore limitée. Pour l'auteure, «Avec plus de 300.000 applications en santé qui existent aujourd'hui sur les stores, il est difficile de s'orienter et de savoir quelle application utiliser, et pour quel bénéfice». La consolidation de la filière e-santé constitue un enjeu majeur pour éviter l'éparpillement de ces solutions digitales, de même que l'évaluation de leur service rendu. Pour ce faire, des partenariats avec des équipes de recherche doivent être encouragés. Par ailleurs, le parcours de remboursement des thérapies digitales reste opaque et complexe et encore peu adapté aux spécificités de la e-santé. Enfin, une des priorités du déploiement de Mon Espace Santé en 2022 doit être de générer de l'usage autour du dossier médical partagé (DMP) en favorisant l'expérience patient et professionnel la plus fluide possible.

5. Rendre plus fluides les passages entre ville, domicile, hôpital et médico-social


Les clivages sont très forts entre les différents lieux du soin, le domicile, le médico-social. Les modalités tarifaires actuelles participent de cette fragmentation et montrent aujourd'hui clairement leurs limites. Il est temps d'inciter à la qualité et à la coordination plutôt qu'au volume. Un grand nombre de systèmes de santé dans le monde a fait évoluer les modalités de financement vers des modèles de paiement alternatifs avec des objectifs doubles : renforcer la rémunération à la performance et à la qualité et créer des incitatifs à l'intégration et à la coordination des parcours. Sur la base des expérimentations en France et des retours d'expérience étrangers, des modalités de paiement alternatives doivent être développées pour faciliter coordination, qualité et efficience. De même, les incitations financières des professionnels de santé pour encourager à la remontée de données et aux usages en e-santé, doivent être revues.


Les chiffres clés du parcours patient

 

Des patients acteurs de leur santé

Les transformations récentes ont modifié le rapport des citoyens au système de santé : ceux-ci sont plus autonomes et souhaitent être impliqués et mieux informés sur les soins qu’ils vont recevoir. De malades passifs, ils sont devenus des patients-acteurs impliqués : 90 % d’entre eux jugent que la publication d’indicateurs sur la qualité des soins est une bonne chose. Pourtant, les patients sont encore largement oubliés dans la gestion et l’organisation des parcours de soins.

L’organisation du système de santé semble aujourd’hui en décalage avec les besoins et les attentes des patients, ce sentiment se traduisant chez les Français par une perception très dégradée de l’accès aux soins : 37 % d’entre eux déclarent avoir l’impression de vivre dans un désert médical.

Des parcours labyrinthiques

Les maladies chroniques impliquent souvent des prises en charge au long cours dans lesquelles une multitude d’intervenants, peu coordonnés, se succèdent auprès du patient :

  • les personnes souffrant de syndromes parkinsoniens doivent consulter en moyenne 30 intervenants (1 médecin généraliste, 18 spécialistes, 7 professionnels paramédicaux et 4 autres professionnels) ; 
  • pour les personnes souffrant d’affections psychiatriques de longue durée ce sont en moyenne 11 intervenants (6 spécialistes, un intervenant paramédical et 4 professionnels du médico-social) ; 
  • pour un accident vasculaire cérébral (AVC) en moyenne entre 13 et 24 professionnels participent à la prise en charge.L’organisation chaotique de l’offre de soins a des conséquences fortes sur les coûts et les dépenses de santé.

La France compte parmi les pays qui consacrent une part importante de leur PIB à la santé (11,3%), ce qui est heureux, la santé constituant une priorité dans notre société et un secteur fortement créateur de valeur et d’emplois. Malheureusement, les inefficiences sont nombreuses et souvent liées aux dysfonctionnements dans l’organisation et la coordination des soins : non suivi des bonnes pratiques (par exemple dans les prescriptions d’antibiotiques), redondance des actes, complexité et mille-feuille administratif, sur-prescription. Selon un rapport de l’OCDE publié en 2017, ces « gaspillages » représenteraient près de 20% de nos dépenses de santé.

Avoir “accès au bon soin, au bon moment”

L’accès rapide et équitable aux soins constitue un enjeu majeur pour nos concitoyens et la e-santé apporte des leviers importants au service des patients comme des professionnels. La question de l’illectronisme, qui touche aujourd’hui près de 17 % des Français, se doit donc d’être soulevée. Le numérique peut en effet être à la fois une très grande opportunité et un vecteur d’éloignement de la santé comme le pense près de la moitié des Français.

Les travaux du programme Santé de l'Institut Montaigne

 

Cette note s’inscrit dans le prolongement de plusieurs travaux de l’Institut Montaigne sur la santé lesquels posent notamment des constats sur l’importance de la mesure de la qualité des soins (Système de santé : soyez consultés !, avril 2019) ainsi que de la transformation numérique (E-santé : augmentons la dose !, juin 2020) de notre système de santé. 



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